Championnat des foals : à Saint-Lô, Nippy fait les belles heures du Berri
À Saint-Lô mi-septembre, Nippy du Berri a été sacré foal suprême et a obtenu la meilleure note du contingent des mâles âgés. Ses éleveurs, Elisabeth et Dominique Labesse, habitués du championnat des foals, détaillent les choix qui les ont amenés à faire naître ce joli fils d’Emir du Chanu.
Passionné de chevaux de sport, Dominique Labesse, qui a toujours côtoyé des chevaux de trait au milieu des exploitations agricoles, s’est installé en 1982 au sud de l’Indre, à Chassignolles (36). La même année, il a acheté une première poulinière pour élever des chevaux de sport. “J’ai toujours été passionné”, indique celui dont l’activité première est l’élevage de bovins charolais. “Je n’ai jamais fait plus de un ou deux poulains par an, en étant attentif aux lignées maternelles et les chevaux qui avaient été produits au fil des générations au sein de ces lignées. J’ai toujours choisi mes mères en fonction de cela : je préfère des lignées où l’on retrouve plusieurs bons chevaux de sport à chaque génération, plutôt que des lignées où il est ressorti seulement un ou deux cracks et rien d’autre à côté.” C’est cette réflexion qui a conduit Dominique Labesse à faire l’acquisition de Vendetta Gerbaux, la mère de Nippy, en 2014.
Vendetta, une rencontre entre passionnés
“C’est par le biais d’une petite annonce parue dans L’Eperon que j’ai trouvé Vendetta”, poursuit Dominique. “La jument se trouvait en Saône-et-Loire, chez Anne-Marie et le regretté René Berthet, de véritables passionnés. Le papier de Vendetta m’avait plu : c’est une fille de Quidam de Revel. Elle était à l’époque pleine d’Ogrion des Champs, et j’aimais beaucoup cet étalon. Avec Anne-Marie et René Berthet, nous nous sommes tout de suite bien entendus, et j’ai donc fait l’acquisition de Vendetta. Sa lignée était intéressante : dans sa souche maternelle, onze chevaux sont indicés à plus de 140. On y trouve une production homogène, qualitative, pas des grands cracks, mais plusieurs bons chevaux.” En 2015, est donc né Frisbee du Berri, fils d’Ogrion des Champs. “Aujourd’hui, Frisbee tourne sur des épreuves 1,35, 1,40 mètre”, pointe Dominique Labesse. “Nous suivons avec attention son parcours.” Parmi les huit produits donnés par Vendetta, tous portés par la fille de Quidam, Guerilla du Berri, une fille de Number One d’Iso, qui avait beaucoup plu à ses naisseurs. “Elle a été finaliste à trois ans, lors de l’Evénement femelles du stud-book Selle Français, et a également participé à la finale des Cycles libres de 6 ans avec son cavalier, un amateur passionné, Bastien Bougro.”
Le choix judicieux d’Emir du Chanu
En 2021, le couple Labesse était à Fontainebleau, à l’occasion de la Grande semaine de l’élevage de saut d’obstacles. Il a ainsi assisté à la performance du formidable Emir du Chanu, aux commandes de Marie Demonte, qui avait gagné le championnat des chevaux de 7 ans. “Nous avons aimé sa force, sa manière de faire, son style à l’obstacle”, se remémore l’éleveur. “Début 2022, nous l’avons revu au Salon des étalons de Saint-Lô, et avons apprécié sa présence. Il avait une excellente lignée maternelle, avec beaucoup de bons chevaux qui en étaient issus. Il nous fallait également de la taille pour Vendetta, qui mesure environ 1,65 mètre au garrot, et de l’os. Notre jument ne possède pas une locomotion phénoménale, elle est très dans le sang, émotive. Emir lui a apporté ce qui lui manquait.” Dans sa logique de croisement, Dominique Labesse explique ainsi compenser les défauts de la jument avec les qualités du mâle. Et, visiblement, il a fait un choix judicieux avec Emir, qui a une production assez confidentielle (vingt-trois produits selon les registres du Sire), mais qui voit quand même l’un de ses fils remporter le championnat des foals cette année.
“Une petite part de chance”
Dès qu’il a un joli poulain, le couple Labesse se déplace jusqu’au concours local de Lignières pour le présenter. “J’essaie de participer chaque année, parce que c’est intéressant de rencontrer du monde, de voir la production des voisins et celle de certains jeunes étalons”, énumère l’éleveur. “Et puis, les concours, c’est convivial, ça permet de sortir de chez soi et d’être objectif sur sa propre production.” Après l’étape régionale, cette année, le cap a ainsi été mis sur le championnat national des foals de Saint-Lô. Et dire que les choses se sont bien passées est un euphémisme. “Le poulain a plu aux juges et il s’est très bien présenté”, admet son éleveur. “Dans ces concours, il faut quand même une petite part de chance car les juges évaluent ce qu’ils voient à l’instant T. Si le poulain ne se présente pas bien, qu’il est moins aérien que dans son pré, on peut vite perdre un point.”
Nippy a fait preuve d’une belle régularité sur les deux journées, et les juges ont confirmé leur première impression : le poulain a obtenu deux moyennes de 18.15 sur les deux jours, avec des allures et une impression d’ensemble évaluées à 18.50… “J’allais à Saint-Lô en me disant que si je faisais un Top 10 ou un Top 15, ce serait déjà très bien”, indique l’éleveur. “Je ne m’attendais pas à un tel résultat. Je savais que j’avais un beau poulain, parce que Nippy avait de la présence, qu’il bougeait bien… Quand il était petit, il était comme monté sur ressorts. Mais de là à gagner… J’ai eu l’occasion d’échanger un peu avec les juges du stud-book après le rendu de leurs notes, ils m’ont dit que Nippy avait du chic, qu’il était bien orienté et que c’était un poulain moderne, pas trop lourd.”
Depuis son sacre, Nippy a été vendu et a rejoint les écuries du Groupe France Elevage. Deviendra-t-il un prometteur reproducteur, à l’instar de son père ? “Il y a encore du chemin avant d’être approuvé et utilisé”, reconnaît Dominique Labesse. “Mais c’est vrai que j’aimerais beaucoup le voir un jour proposé dans un beau catalogue.” Quant à Vendetta, elle devrait donner naissance en 2024 à un produit d’Up to You*GFE qui, selon son propriétaire, devrait lui apporter taille et locomotion. Et peut-être un aussi joli poulain que Nippy.