Jérémie Rolland, adepte des valeurs sûres
Installé à Pirou, dans la Manche, l’élevage de Jérémie Rolland et Marion Guerrin a vu en 2023 l’un de ses produits, Nougat du Lirot, être sacré champion de France des foals. Malgré son activité d’éleveur, de cavalier, d’étalonnier et d’enseignement, le couple parvient à garder du temps pour bien choisir ses croisements.
Combien de poulains faites-vous naître par an ?
Cette année, je vais faire naître quinze poulains pour mon compte. Mais, en totalité, si je compte les poulinages des juments qui sont en pension à la maison, ainsi que ceux des clients qui viennent de l’extérieur, je vais assister à environ trente-cinq poulinages. Cela fait des sacrées saisons, on ne chôme pas !
Sur quelles souches maternelles travaillez-vous ?
J’ai peu de souches, mais je les juge très qualitatives. Je travaille avec la souche de Cheilane de Blondel (Nonstop, Bwp et Surprise de Blondel par Kassidi), une très bonne jument que j’ai achetée à Michel Ruel à l’âge de deux mois et que j’ai revendue à sept ans. Cheilane, issue de la même souche de Snaike de Blondel (Calvaro, Holst), le père de Dynamix de Belhème, ou de Guarana Champeix (Rivage du Poncel), performer sous la selle de Rutherford Latham, m’a donné dix poulains, dont Iguana du Lirot (Panama Tame), sacrée championne de France des 3 ans Sport en 2021. Autre souche dont je dispose : celle d’Itot du Château, avec la propre sœur de mon étalon Happy Day d’Iscla (Toulon, Bwp x Kannan, KWPN), issue de Signora, fille de Sophie du Château. Il s’agit de Qapella di Lino, qui a terminé deuxième du championnat des chevaux de 7 ans cette année à Fontainebleau, sous la selle de Guillaume Batillat. J’ai notamment une de ses filles, Little Kiss du Lirot, par Conthargos, Old. Je dispose depuis peu également de Mandragore des M (Grandorado TN, KWPN), que j’ai achetée cet automne lors de la vente du haras des M avec un ami, Philippe Michard. Mandragore est la sœur utérine d’Antidote de Mars (Diamant de Semilly).
Avez-vous fait vos choix d’étalons ?
Oui, mes choix d’étalons sont faits. Pour La Luna du Lirot (Deuxcatsix d’Eglefin), issue de la souche de Cheilane, j’ai sélectionné Diamant de Semilly. Pour Jalisca du Lirot (Diamant de Semilly), je vais aller à Taalex, BYWBL, et sans doute à Check In, OS, et Happy Day d’Iscla. J’aime beaucoup le croisement Taalex x Diamant, qui a notamment produit Freud de Kreisker. Je crois beaucoup aux courants de sang et je veille à la bonne génétique des pères que je choisis, pas uniquement à leurs qualités physiques. Pour Miss du Lirot (Happy Day d’Iscla), qui est une petite-fille de Cheilane, je vais aller à Zirocco Blue (ex Quamikase des Forêts). Du côté de la souche d’Itot, Little Kiss du Lirot (Conthargos, Old) va aller à Milton Z (Mylord Carthago). C’est un cheval qui a beaucoup de classe, très élastique avec des moyens hors du commun. Il bouge très bien, et c’est un Mylord. Little Kiss ira également à l’un des étalons maison que j’ai commercialisé, Jet Set du Lirot, un fils de Cheilane par Diamant. Je mêle donc mes deux bonnes souches maternelles avec ce croisement. Lubie d’Iscla (Diamant de Semilly), petite-fille de Signora, ira à Taalex ainsi qu’à Milton Z également. Je procède ainsi encore une fois au croisement Taalex x Diamant. Enfin, Mandragore, la fille de Grandorado TN et sœur d’Antidote de Mars (Diamant de Semilly), ira à Jet Set du Lirot, Diamant de Semilly et Emerald, Bwp. Je mets une fois de plus Diamant sur cette souche, car cela a notamment produit Antidote de Mars, qui est une belle réussite. J’utilise pas mal Diamant, car c’est une valeur sûre et commercialement parlant, c’est intéressant. Cela permet, dans les pedigrees des femelles par exemple, de ne pas avoir de trou dans le papier, contrairement à l’utilisation de certains jeunes étalons qui ne se révèlent finalement pas. Je vends mes chevaux assez jeunes pour la plupart, et c’est plus simple quand le pedigree s’appuie sur des valeurs sûres. Et, du côté de la jeune génétique, je n’y trouve pas toujours mon compte. Je vois beaucoup de jeunes étalons qui seront à coup sûr de bons chevaux de sport, mais pas forcément des pères confirmés. Les jeunes reproducteurs que j’utilise, comme Happy Day d’iscla ou Jet Set du Lirot, sont des étalons que je connais par cœur et qui ont une vraie richesse en termes de pedigree. J’aime bien voir où je vais et c’est vrai que je préfère m’appuyer sur une génétique dont je suis réellement convaincu des qualités.
Que recherchez-vous dans vos croisements ? Quels atouts attendez-vous d’un étalon ?
J’ai eu la chance de côtoyer Michel Ruel qui m’a appris l’importance des lignées maternelles. Et c’est cela qu’il faut avant tout privilégier. Je pars donc de très bonnes juments, et je vais vers des étalons qui me plaisent. J’aime les reproducteurs qui ont du cadre, de l’équilibre. Dans ma jumenterie, j’ai deux types de juments : certaines avec beaucoup de sang, à qui il faut des étalons avec du gabarit, et d’autres qui ont déjà de la taille. Je choisis donc mes reproducteurs en fonction de ce qu’ils doivent apporter. J’aime qu’ils aient un bon geste de devant, de la locomotion, de l’énergie. Comme je vends mes chevaux assez tôt, j’apprécie les étalons qui font des chevaux assez précoces, je ne vais donc pas à Kannan, KWPN, par exemple.