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L’Expertise

Soigner et prévenir les ulcères gastriques

Emilie Dupont 29 février 2024

Chaque mois, l’IFCE propose plusieurs webconférences, sur des sujets très variés comme l’alimentation, le bien-être, la génétique, le travail des chevaux, etc. Cette semaine, L’Eperon vous propose de revenir sur la webconférence donnée par le Docteur Valène Prunier, vétérinaire à la clinique de Saumur. Au programme : les ulcères gastriques chez le cheval de sport.

C’est une pathologie très commune chez les chevaux : les ulcères gastriques. Selon diverses études, elle toucherait environ 58% des chevaux de sport à l’entraînement et/ou sortant en compétition. Et ce chiffre est encore plus élevé lorsqu’il concerne les chevaux de course : 87% des trotteurs et même 100% des purs-sang souffrent d’ulcères gastriques. Néanmoins, tous ne développent pas la même forme de cette pathologie, qui correspond à des altérations variables (en taille, en nombre, en profondeur et en localisation) de la muqueuse de l’estomac. « Il existe deux types d’ulcères gastriques : ceux qui touchent la muqueuse squameuse, située sur la partie haute l’estomac, et ceux qui touchent la muqueuse glandulaire, située sur la partie basse. Tous deux sont dus à un déséquilibre entre les éléments de protection et les éléments d’agression de l’estomac, mais sont engendrés par des mécanismes différents », souligne Valène Prunier, vétérinaire.

Causes et facteurs de risque

Dans le cas des ulcères situés au niveau de la muqueuse squameuse, la cause principale n’est autre qu’une proportion trop importante d’acides gastriques dans l’estomac. Cela peut être dû au stress, à une alimentation inadaptée ou encore à l’entraînement et la compétition pratiqués de manière trop intense. Ainsi, si un cheval ne mange pas assez de fourrage, la muqueuse squameuse risque d’être plus exposée à l’acidité gastrique. Autre exemple : des entraînements trop intenses peuvent provoquer une contraction de l’estomac du cheval, faisant ainsi remonter l’acidité gastrique au niveau de la muqueuse. Les ulcères situés au niveau de la muqueuse glandulaire sont quant à eux généralement dus à la diminution de la protection de cette zone, qui peut être causée par l’utilisation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, une inflammation gastro-intestinale ou encore une infection bactérienne.

Signes cliniques et diagnostic

Si les mécanismes à l’origine des deux types d’ulcères gastriques sont différents, les signes cliniques sont, eux, les mêmes, et au nombre de quatre : des signes digestifs (coliques récurrentes, diarrhées chroniques, dysorexie) et comportementaux (bâillements, agressivité), mais aussi des signes visibles à l’effort (contre-performance, rétivité au travail) et à l’état général du cheval (amaigrissement, poils piqués). Mais attention, il n’est pas possible de distinguer le type d’ulcère en fonction des signes cliniques, et l’intensité de ces derniers n’est pas proportionnelle à la sévérité de la pathologie. « Un cheval avec des ulcères très profonds n’aura peut-être pas de signes sévères », précise Valène Prunier. De plus, ces signes cliniques sont variables et, surtout, non spécifiques. « Ce sont des caractéristiques communes à d’autres pathologies. Il est donc nécessaire de réaliser un diagnostic afin de savoir de quoi il s’agit », ajoute la vétérinaire. Et pour diagnostiquer les ulcères gastriques, il n’existe qu’une seule méthode : la gastroscopie. « Une caméra est insérée par le nez du cheval jusqu’à l’estomac », indique Valène Prunier. 

Traitements et prévention

Afin de soigner et prévenir les ulcères gastriques, trois points sont à respecter. Tout d’abord, comme le souligne la vétérinaire, il est important de limiter tous les facteurs pouvant altérer le fonctionnement gastrique. Pour cela, Valène Prunier recommande d’adapter l’effort à l’entraînement et en compétition, mais aussi de minimiser le stress environnemental pouvant par exemple être lié à un nouvel environnement, au transport ou encore à des conflits avec les congénères.

Lorsque des ulcères ont été diagnostiqués, il est nécessaire d’établir un plan thérapeutique, adapté en fonction de leur localisation, leur profondeur, etc. « Pour cette pathologie, on parle de polythérapie : à partir d’un traitement médicamenteux, il faut à la fois diminuer l’acidité gastrique et favoriser la protection des muqueuses de l’estomac », souligne Valène Prunier. Enfin, pour prévenir les ulcères, il est important de respecter plusieurs points : s’assurer que le cheval ait un accès permanent à de l’eau propre, favoriser le pâturage avec un accès continue à des fibres ou du fourrage (pour rappel, un cheval doit avoir un apport en fibres d’au moins 1 à 2 % de son poids vif, soit dix kilogrammes de foin pour un équidé de 500 kilogrammes), limiter les périodes de jeûne (qui doivent être inférieures à six heures) et les aliments concentrés riches en amidon, proposer de la luzerne au cheval, et adapter le type et la distribution de l’alimentation en fonction de l’activité physique. « Il faut également éviter l’ingestion directe de pâte électrolytique ou de solutions hypertoniques, qui sont à utiliser uniquement diluées. Cependant, il peut être intéressant d’utiliser des compléments alimentaires comme l’huile de maïs, qui favorise la protection de la muqueuse », conclut Valène Prunier.

Crédit photo à la une: Pixabay