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Benjamin Ghelfi : « Garder en ligne de mire le très haut de gamme »

Elisa Esnault 11 janvier 2024

Benjamin Ghelfi, directeur de l’agence Fences, revient sur les résultats obtenus lors des ventes 2023, dresse le bilan de cette année, nous parle de l’envers du décor des sélections et des objectifs pour 2024.

Quel bilan tirez-vous de l’année 2023 ? 

2023 a été une très bonne année pour Fences. Lors des ventes Élite réservées aux chevaux de trois ans, notre chiffre d’affaires a été un peu moins important qu’en 2022, mais c’était pour nous une année exceptionnelle puisque nous avions déjà fait + 20% de chiffres d’affaires que l’année précédente. Nous sommes revenus aux alentours des chiffres de 2020 et 2021, qui étaient déjà des bonnes années étant donné que tous les ans, nous connaissions une augmentation d’à peu près 10 à 13%. Cependant, en 2023, nous avons beaucoup développé nos ventes de performers (chevaux âgés de 5 à 8 ans, ndlr). L’année dernière, une vente supplémentaire à eu lieu à Fontainebleau, mi-avril, à laquelle s’ajoutent celles de Bourg-en-Bresse et de Deauville. Cela a bien solidifié notre développement du côté des performers. Nous avons aussi fait de très belles ventes sur Internet, notamment celle du Haras des M. En 2023, nous pouvons donc dire que les résultats concernant les chevaux de trois ans sont devenus un tout petit peu plus réalistes que ceux de 2022. Mais nous continuons d’avoir une progression constante d’année en année.

L’an passé, vous nous disiez que les gens préféraient mettre beaucoup d’argent dans un excellent cheval plutôt que dans trois bons. L’année 2023 a-t-elle confirmé cette tendance ?  

Oui, tout à fait. On sent que les gens veulent de la qualité et qu’ils sont exigeants. Ils veulent du modèle, du papier, de bonnes visites… donc nous sommes vraiment très rigoureux dans notre sélection. Nous nous sommes rendus compte, l’année dernière, que nous avions eu moins de top prices qu’auparavant, mais que nous avions obtenu un meilleur prix moyen. C’est-à-dire que notre catalogue des chevaux de trois ans étant très bon, les gens se disaient : “si je n’ai pas celui-là, j’en ai encore dix, quinze ou vingt qui me plaisent donc j’essaierai d’avoir celui d’après”. Les acheteurs dépensent assez facilement 50 000 euros pour un très bon trois ans, et se tournent vers d’autres chevaux si le premier qu’ils souhaitent devient hors budget. Par conséquent, les prix se sont un peu nivelés. 

Quelle a été la meilleure vente de 2023 ?

L’année dernière, notre vente phare du point de vue du chiffre d’affaires et surtout du nombre de chevaux vendus reste celle des chevaux de trois ans pendant la Grande semaine de l’élevage de Fontainebleau. Nous y sommes très attachés, cela fait trente-cinq ans qu’elle existe. C’est une vente solide et nous sommes vraiment les leaders en France sur ce type de vente. Par ailleurs, nous sommes très contents de la façon dont se développent nos ventes de performers pour une première année. Nous avons fait une très bonne vente à Fontainebleau et nous avons encore augmenté notre chiffre d’affaires à Deauville. Nous restons très rigoureux dans notre sélection et dans la qualité des chevaux, et nos clients nous le rendent bien, donc nous sommes contents.

Quel est le pourcentage des chevaux vendus parmi ceux présentés ? 

De mémoire, je pense qu’aux Ventes Élite nous devons vendre 88% voire 90% des chevaux présentés. Et pendant les ventes de performers, en tout, on doit être entre 75% et 80%.

Que faites-vous des 10% de chevaux restants ? Arrivez-vous à les commercialiser ? 

Parfois, nous arrivons à en vendre quelques-uns à l’amiable, à des personnes qui regrettent de ne pas avoir mis une enchère par exemple. Mais ces chevaux-là, nous les comptons souvent dans les 90% de vendus. Les 10% de chevaux de trois ans que nous n’arrivons pas à vendre repartent chez leur propriétaire. Et souvent, ils les exploitent, les valorisent, ou les vendent à quelqu’un d’autre. Mais la plupart du temps, la raison pour laquelle les chevaux ne sont pas vendus est une question de prix. Parce qu’il y a toujours des clients intéressés, mais parfois il y a des vendeurs qui estiment plus leur cheval que les potentiels acquéreurs ne l’estiment ce jour-là. La vente dépend également de la façon dont se présente le cheval. Parfois, il est moins bien pour diverses raisons le temps d’une soirée. Il a le droit.

Comme vous l’avez dit, vous réalisez un vrai travail de sélection lorsque vous choisissez les chevaux que vous commercialisez. Pouvez-vous nous rappeler la manière dont vous procédez et les critères retenus lors des sélections ?

Nous organisons une tournée que nous faisons à plusieurs. Nous sommes toujours entre trois et six associés. Pendant ces tournées, nous nous rendons sur des lieux précis en France et en Europe, communiqués en début d’année, afin que les éleveurs et propriétaires nous amènent leurs chevaux. Nous les regardons et si nous estimons qu’ils peuvent correspondre à l’une de nos ventes, que ce soit la vente de Deauville, la vente Élite de trois ans ou éventuellement une vente sur Internet, nous discutons avec les propriétaires du prix jusqu’en dessous duquel ils sont prêts à les vendre. Et si nous nous entendons sur un bon rapport qualité/prix, un vétérinaire sur place effectue des radios aussitôt. Si ces dernières sont bonnes, nous signons un contrat et nous ajoutons les chevaux à nos catalogues. Concernant nos critères, le premier que nous avons est la qualité de saut. Ensuite, on va dire que c’est le modèle, ex aequo avec le pedigree. Et surtout, nous faisons très attention à éliminer tous les chevaux qui ont des tares rédhibitoires, tels que de mauvais aplombs par exemple. Nous sommes très rigoureux sur toutes ces choses là. Le tempérament du cheval est également important, mais lorsqu’il s’agit de trois ans, nous restons indulgents. En fait c’est un ensemble. Nous regardons d’abord la qualité du cheval, sa façon de faire, et essayons de privilégier de beaux modèles.

Quels ont été les top prices en 2023 ?

Le top price de cette année est de 100 000 euros. Deux chevaux ont été adjugés à ce prix : le premier est une jument, Kalinca de Hus (Comme Il Faut, Westf et Qaresse de Kreisker par Diamant de Semilly), vendue au cours de la troisième soirée des ventes Élite. Le second est Olmetec de Bueno, un étalon fils de Jobolensky Sitte, sBs et de Cian Ka’an HD Z (Corporal VDL, Westf), vendu la veille. 

Quels retours avez-vous eu de la part du public et des acheteurs sur vos événements ? On connaît l’ambiance Fences, qui est assez festive, y a-t’il eu des nouveautés en 2023 ? 

Non, pas vraiment. Il n’y a pas eu de nouveautés particulières pour les ventes Élite l’année dernière. Nous sommes en train de réfléchir à ce que nous pourrions faire à l’occasion du trente-cinquième anniversaire des ventes Fences, mais c’est vrai que nous sommes assez limités avec les chevaux de trois ans. Il ne nous est pas possible de mettre trop de lumières ou de sons, car on ne peut pas prendre le risque que cela affole les chevaux. Il faut que cela reste assez sobre. C’est déjà un très bel événement ainsi. Il y a déjà beaucoup d’ambiance, avec quand même entre 550 et 750 personnes assises à table tous les soirs.

Les gens prennent-ils autant le temps de se déplacer qu’avant ou voyez-vous que les ventes augmentent plutôt sur Internet ?

Pour ce qui concerne les ventes Élite, 90% des ventes se finissent en salle. Nous avons beaucoup de personnes qui enchérissent sur Internet en suivant les chevaux en live, mais souvent, la dernière enchère se fait en salle. Nos ventes sur Internet ont connu un vrai essor en 2022, qui est resté plutôt stable en 2023. Nous réalisons près de 90% de nos ventes en salle et 10% sur Internet.

L’année dernière, vous avez ajouté une vente durant le Printemps des sports équestres pour les chevaux âgés de cinq à huit ans. Prévoyez-vous d’ajouter de nouvelles dates à votre calendrier 2024 ?

Non, a priori, en 2024, nous ferons les mêmes ventes qu’en 2023. C’est-à-dire trois ventes de performers à Fontainebleau, Bourg-en-Bresse et Deauville, deux ventes de chevaux de trois ans à Deauville début juillet, pour la vente de sélection, et à Fontainebleau pendant la Grande Semaine. Ces cinq ventes seront donc en physique, mais il y aura sûrement quelques nouveautés dans les ventes sur Internet car nous faisons beaucoup de réductions d’effectifs ou de vente de services pour des élevages qui nous contactent tous les ans. Mais ça vient souvent au fur à mesure. Donc nous allons essentiellement suivre le même programme qu’en 2023.

Pour finir, quels sont vos objectifs pour 2024 ? Y a-t-il des choses que vous souhaiteriez améliorer ?

Comme chaque année, ce n’est pas la quantité que nous cherchons à augmenter, mais vraiment la qualité. Toujours continuer d’essayer de trouver les meilleurs trois ans, les meilleurs chevaux d’âge, les performers, dans le but de satisfaire nos clients. L’idée n’est donc pas de faire plus, mais plutôt de continuer à garder en ligne de mire le très haut de gamme en vendant toujours autour des 80% des chevaux que nous présentons.