Casanova et Valentin Quittet-Eslan font briller l’élevage d’Ems sur les terrains de complet

Le mois dernier, Casanova d’Ems et Valentin Quittet-Eslan étaient sacrés champion de France de concours complet dans la catégorie Juniors. Une belle consécration pour ce couple, qui est un superbe ambassadeur de l’élevage familial. 

“Cela fait près de quarante ans que j’élève des chevaux et Casanova (Elan de la Cour) est assurément l’un des meilleurs que j’ai fait naître”, affirme avec aplomb et fierté Emmanuel Quittet, qui, depuis quelques années, voit son protégé évoluer aux côtés de son fils, Valentin. La fierté d’un éleveur, d’un père et d’un coach, qui a été décuplée en août dernier, lorsque le couple a été sacré champion de France Juniors et a décroché sa sélection pour les championnats d’Europe de Montelibretti. Si, malheureusement, Casanova et Valentin ne pourront finalement représenter la France en Italie en raison d’une boîterie de l’alezan, leur histoire, placée sous le signe d’une passion familiale, n’en est assurément pas moins belle.

Le bon match

Entre Casanova et Valentin, tout a commencé il y a un peu plus de deux ans, alors que le jeune cavalier montait encore à poney. “Nous avons débuté ensemble à la maison, avant de nous lancer sur des épreuves Amateur 2 et Amateur 1 et, quelque temps plus tard, de faire nos premiers pas sur le circuit Juniors et nos premiers internationaux”, se souvient l’ancien pilote de l’excellent Winnetou, NRPS (Wannahave, NRPS), avec qui il avait participé aux championnats d’Europe Poneys de Strzegom en 2021. Rapidement performants, Casanova et Valentin décrochent leur première sélection en équipe de France à l’occasion des championnats d’Europe d’Hartpury l’année dernière. Une échéance qui, malheureusement, ne s’est pas conclu comme prévu (l’alezan n’ayant, après un bon dressage et un sans-faute sur le cross, pas été accepté lors de la seconde inspection vétérinaire), mais qui n’a pas découragé le duo, qui est finalement revenu encore plus fort cette année et a enchaîné les bonnes performances jusqu’à être sacré champion de France. “Casanova est un cheval qui va vraiment très bien sur le cross. Petit à petit, il s’est mis à très bien dresser, jusqu’à tourner aujourd’hui autour des 70-75% à chaque reprise. L’hippique peut encore être perfectionné mais c’est vraiment un très bon cheval. Avant de passer sous la selle de Valentin, il a été formé par Martin Denisot, mon gendre, sur les circuits Jeunes chevaux”, tient à souligner Emmanuel Quittet, le père de Valentin et naisseur de Casanova, qui les voit évoluer avec bonheur.

Quarante ans de passion…

Casanova d’Ems, tout comme l’autre partenaire de Valentin, Feu Follet d’Ems (Flipper d’Elle), est donc issu de l’élevage familial, fondé il y a plus de quarante ans par Emmanuel Quittet. “J’ai fait naître mon premier cheval en 1982 et j’attends, pour l’année prochaine, mon centième poulain”, indique l’ancien sélectionneur de l’équipe de France Poney et éleveur, qui accueille en moyenne trois à quatre nouveaux produits par an. “Tout a commencé avec deux juments : mon ancienne partenaire de concours, Faline A (Tyrolien), qui a tout d’abord donné naissance à Quaroub (Le Gregol, AA), mon premier poulain, que j’ai emmené jusqu’en CCI3*, et une Anglo-arabe que j’ai achetée, Olmega (Taylor, AA), dont j’ai aujourd’hui encore la souche car j’ai gardé certaines de ses filles et petite-filles.” Parmi elles, Fantasie d’Ems, AA (Nathan de la Tour, AA x Fayriland, AA), qui fait partie du cheptel de poulinières actuel et a donné naissance au quatre-vingt-dix-neuvième poulain de l’élevage d’Ems cette année, Nuage d’Ems, AA (Quercus du Maury, AA). “J’aimerais le garder en tant qu’étalon en raison de son très bon pedigree. Il est magnifique. Celui-là, il a tout pour réussir”, assure l’éleveur. Un produit dont Emmanuel est très fier, notamment parce qu’il a été longtemps attendu. “Ces trois dernières années, je n’ai eu que des femelles ! J’attendais désespérément un mâle. Alors l’avoir et qu’il soit aussi beau, oui, je suis très heureux”, confie en riant celui qui, désormais, n’hésite plus à garder certains de ses protégés à la maison. 

… et d’évolutions

Pendant plusieurs dizaines d’années, Emmanuel Quittet a toujours vendu tous ses chevaux dès l’âge de trois ans. “Cela ne fait que peu de temps que je garde mes produits. Depuis une dizaine d’années, je les débourre et les confie ensuite à Martin Denisot ou à mes filles. Depuis peu, j’en confie aussi certains à des cavaliers, comme Gentleman d’Ems (L’Arc de Triomphe, Old), qui est sous la selle de Benjamin Massié et avec qui il se classait deuxième du CCI2*-L de Saulieu. Avant, je vendais tous mes produits à l’âge de trois ans, principalement à des amateurs et notamment pour des raisons financières. Beaucoup n’ont pas vraiment fait carrière malgré leurs qualités. Je dois avouer que cela fait un peu mal au cœur mais c’est ainsi. Aujourd’hui, je n’ai plus les mêmes contraintes qu’autrefois donc j’ai pu changer mon système, me faire un peu plus plaisir et valoriser mon élevage”, explique l’éleveur, très lucide mais surtout heureux de pouvoir désormais suivre ses protégés, à l’image de Diabolo d’Ems, AA (Quercus du Maury, AA), qui a notamment participé au Mondial du Lion d’Angers à sept ans et au CCI4* de Blenheim l’an dernier avec Martin Denisot, et, évidemment, de Casanova et Feu Follet. “Ces deux-là, je suis vraiment content de les avoir gardés pour Valentin. Je crois qu’ils ont des qualités hors du commun.”

Avec cette décision de ne plus vendre très rapidement tous ses produits, est également venu celle de prendre le temps, notamment car, tout comme l’activité d’Emmanuel, le marché a, lui aussi, évolué. “Aujourd’hui, il n’est pas difficile de vendre des chevaux à cinq ou six ans. Beaucoup d’amateurs ou de professionnels cherchent des chevaux de cet âge-là, déjà formés.” Pour cette raison et d’autres, l’éleveur a d’ailleurs fait le choix de débourrés ses protégés plus tard. “Avant, je les débourrais tous à trois ans. Maintenant, j’attends qu’ils en aient quatre. Et je vois une vraie différence. Cela étonne la plupart des gens à qui j’en parle mais il est bien plus simple de débourrer à quatre ans. Certes, les chevaux sont désormais plus proches de l’homme mais, surtout, à cet âge-là ils sont mieux dans leur tête. En une semaine, ils sont longés, découvrent la selle et le cavalier, et c’est bon. Cela va vite car ils sont plus à l’aise dans leur tête et dans leur corps, et plus connectés avec nous.”

Repenser également ses croisements

Côté étalons, si Emmanuel Quittet s’est très souvent tourné vers des Anglo-arabe, il le dit lui-même, ces dix dernières années, son point de vue a, là encore, un peu changé, et il utilise désormais certains étalons Selle Français. “Ca a été le cas pour Casanova et Feu Follet, qui sont respectivement issus d’Elan de la Cour et de Flipper d’Elle. Leurs mères sont ou ont du sang Anglo, mais grâce à ces croisements, on retrouve un peu de masse, de la puissance, une vraie qualité de saut, etc. Je crois que c’est le que l’on recherche aujourd’hui dans la discipline”, explique l’éleveur qui regrette par ailleurs qu’il y ait de moins en moins de grands chefs de race du côté de l’Anglo-arabe.

Ainsi, au fil du temps, si la passion de faire naître et de voir grandir ses chevaux est restée la même, Emmanuel Quittet a néanmoins repensé certains aspects de son activité d’éleveur. Tout cela, en conservant cette volonté de produire de bons chevaux de complet, et désormais, avec le bonheur de les voir évoluer à haut niveau sous la selle de son fils, Valentin. Une belle histoire de famille, de passion partagée et, on l’espère, d’autres succès à venir.