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L’Expertise

Comment bien présenter son jeune cheval sur l’épreuve dédiée aux allures ?

Emilie Dupont 31 mai 2023

La saison des concours d’élevage approche à grands pas et la période de préparation des (très) jeunes chevaux ne va pas tarder, elle aussi, à débuter. Mais comment bien les préparer pour les épreuves de modèle, allures et saut en liberté ? Réponses avec Laurent Vignaud et Patrick Pratlong, dans le podcast “Parlons Cheval” de l’IFCE.

Lors d’un concours d’élevage, après la présentation au modèle, vient généralement le test consacré aux allures du cheval. Comme le précise Patrick Pratlong, écuyer du Cadre noir de Saumur, responsable des moyens équestres à l’IFCE et juge national du stud-book Selle Français, c’est cette fois-ci la locomotion du cheval qui est jugée. “Lorsque nous regardons des chevaux après les avoir vus au modèle, nous essayons de faire une corrélation entre ce dernier et leur locomotion, leur manière de se déplacer.” Les chevaux sont ainsi tout d’abord observés en liberté aux trois allures dans un rond d’Havrincourt, puis montés, ce qui permet d’avoir “une idée assez précise du cheval avec et sans le cavalier ainsi que le poids de la selle”.

Des critères pour chaque allure

Lors d’une épreuve dédiée aux allures, le pas, le trot et le galop sont observés et évalués selon des critères bien précis. Comme l’explique Patrick Pratlong, le pas doit être ample, bien décomposé, à quatre temps et, surtout, actif. “Le cheval doit pousser de l’arrière vers l’avant, tout en restant dans une allure bien décomposée”. Il ne faut ainsi pas que l’allure soit précipitée – défaut souvent observé par les juges comme le souligne l’écuyer -, entraînant une perte d’équilibre.

Le trot, pour sa part, est évalué selon des critères de symétrie (les diagonaux doivent avancer de la même manière et avec la même amplitude), de propulsion et d’élasticité dans tout le corps. “Nous aurions parfois tendance à ne regarder qu’un cheval qui lance les pattes en avant, mais le plus important est qu’il y ait un mouvement d’épaule qui parte du haut et déclenche ensuite le mouvement des membres. Si cela ne part pas de l’épaule, on reste sur des allures réduites”, souligne Patrick Pratlong. 

Si la propulsion fait également partie des critères primordiaux d’évaluation du galop, l’équilibre du cheval en toutes circonstances et l’amplitude sont aussi regardés avec attention par les juges. “Le galop doit être à trois temps, et pas à quatre temps comme nous pouvons parfois l’observer en raison d’un manque de souplesse ou une mauvaise liaison de l’arrière vers l’avant”, ajoute l’écuyer et juge.

Déroulement de la présentation

Présenter un cheval sur un test d’allures comporte plusieurs parties. Tout d’abord, lors de la présentation en liberté, l’éleveur vient dans le rond, montre au cheval cet environnement en lui faisant faire un tour afin qu’il ne soit pas trop ému. Car, comme l’affirme Patrick Pratlong, quand le cheval est ému, il se contracte et perd en élasticité, en allant, etc. “Une fois que l’éleveur a montré le rond au cheval, l’intérêt est de voir ce dernier se déplacer au trot et au galop et, une fois qu’il a repris son calme, au pas.

Quant à la partie “allures montées”, les chevaux sont présentés par groupes de deux ou de trois car “ils ont un instinct grégaire, risquent de se sentir perdus et donc de montrer des résistances”, explique l’écuyer et juge. Chaque cheval est tout d’abord observé au trot puis au galop, aux deux mains. “Ensuite, nous le regardons au pas, en cercle autour du jury, pour le voir décontracté à la fin du travail.”

Préparer cette épreuve

Pour la partie en liberté, Patrick Pratlong conseille de préparer en amont le cheval “pour qu’il s’habitue à tourner aux deux mains sans problématique particulière, sans se demander où il est et ce que nous allons lui demander”. Cette préparation peut être effectuée dans le cadre de trois à quatre séances, une semaine à quinze jours avant le concours.

Pour la partie montée, l’écuyer et juge ne recommande pas de monter son cheval pour la première fois la veille, mais plutôt de le débourrer entre un mois et demi et deux mois et demi avant la présentation. “Sinon, cela ne permet pas au jury de l’évaluer en étant décontracté.” Le cheval doit ensuite être monté régulièrement “mais pas trop souvent afin qu’il ne soit pas blasé, qu’il garde son esprit de jeune cheval tout en étant en confiance avec le mors, posé sur la main, dans une attitude qui soit sans défense”. Concernant l’équipement, Patrick Pratlong recommande évidemment d’avoir un filet et un mors bien ajustés, ainsi qu’un matériel adapté afin que le cheval soit, sous la selle, le plus décontracté possible.

Le travail peut-il améliorer les allures ?

À cette question posée par Laurent Vignaud, Patrick Pratlong répond que “le travail va masquer les défauts et améliorer les qualités”. En revanche, comme il le précise également, “un cheval souple le restera toute sa vie, et le cavalier devra apprendre à canaliser cette souplesse pour que les muscles entourant le squelette soient les plus efficients possible, tandis qu’un cheval raide le sera également pour toujours, et le cavalier devra, dans ce cas-là, trouver des compensations de travail pour faire en sorte qu’il ne devienne pas plus raide et qu’il apprenne à se servir de son corps malgré sa raideur”. Car, comme le souligne Laurent Vignaud, lors de ces concours d’élevage, sont sélectionnées “des qualités naturelles, qui ne pourront être améliorées par la suite, ou très peu”.  

Photo : Katoki de Riverland. Crédit : Stud-book Selle Français/Les Garennes.