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L’Expérience

La renaissance d’Ekano DKS – Partie 2

Emilie Le Guiel 2 avril 2023

“Heart – Scope – Mind” (courage – moyens – mental) : telle est la devise de l’élevage DKS, pour Dejan Krunic Sporthorses. Car c’est bien Dejan Krunic, éleveur globe-trotter d’origine serbe, basé aux États-Unis mais dont les chevaux naissent en Mayenne, qui est à l’origine d’un des fleurons du haras de Semilly, l’élégant Ekano DKS. Disparu pendant deux ans des pistes de compétition, le champion des 5 ans 2019 a opéré un retour en grâce lors du dernier Salon des étalons de Saint-Lô, qui a réjoui tous les spectateurs.

Pour lire la première partie du portrait d’Ekano DKS, cliquez ici.

Pourtant, la vie de cheval de sport n’est pas un long fleuve tranquille et contre toute attente, le tableau s’est brusquement assombri. « Après deux années parfaites, le cheval a commencé à être moins bien en milieu de saison de six ans », raconte Richard Levallois. À cette époque, le cheval mène ses obligations sportives et de reproducteur de front (monte en frais). « Cette année-là, la sécheresse a sévi en Normandie. Nous n’étions pas encore dans nos nouvelles installations de Couvains, et nous ne disposions pas d’une carrière de qualité optimale. Pensant bien faire, notre cavalier montait le cheval dans un champ plutôt que dans la carrière fouillante. Nous pensons a posteriori que cela a pu fragiliser sa boîte cornée. Même si nous ne voyions rien en apparence, le cheval s’est mis à boiter. Lors de la finale des 6 ans, Ekano a enregistré une contre-performance inhabituelle pour lui, sans boiterie. Nous ne comprenions pas. Huit jours après, le cheval a déclaré une seime au sabot. Nous avons eu énormément de mal à enrayer cela », se souvient l’éleveur normand. Près de deux ans ont été nécessaires pour que la seime se résorbe, après de nombreuses tentatives infructueuses de ferrures et autres errances de maréchalerie. À l’aube de sa saison de neuf ans, les Levallois tentent une dernière solution le tout pour le tout en déferrant Ekano. Et quinze jours plus tard, le miracle se produit. « Il était métamorphosé. Nous l’avons vu revivre, jouer, être heureux de reprendre le travail. À l’heure actuelle, la seime s’est refermée et on ne décèle même plus à l’œil nu quel pied était atteint », se réjouit son propriétaire.

Un retour en phoenix

Revu au Salon des étalons de sport de Saint-Lô en février dernier, le cheval a réalisé une démonstration d’aisance sur les parcours à plus d’1,40 mètre, proposés par les chefs de piste du Grand Match, dont il termine à la troisième place, rapidement confirmée par de bons résultats à Auvers (cinquième du Grand Prix Pro 2). Désormais sous la selle de Jean-Marc Le Guennec, Ekano a conquis les spectateurs par sa légèreté sur les barres et l’impression de facilité dégagée par leur couple. « J’ai commencé à monter Ekano un mois après mon arrivée au haras de Semilly, en décembre dernier », témoigne le nouveau pilote de l’écurie Levallois. « C’est un cheval qui est respectueux à 100%, très sensible, moderne. Mon job consiste simplement à lui donner confiance. Beaucoup de gens n’ont pas spontanément reconnu Ekano car sa robe a beaucoup blanchi durant son absence des terrains, mais aussi car les jeunes étalons qui ne sont plus sous les feux des projecteurs sont vite oubliés par les éleveurs. Mais dès le lendemain du Grand Match, les retours ont été immédiats et c’est l’étalon de notre catalogue qui a été le plus demandé. Nous sommes d’autant plus confiants que sa production témoigne en sa faveur », poursuit Richard. Son éleveur, lui, ne l’a jamais oublié. « Nous sommes très reconnaissants envers Richard et Anne-Sophie Levallois du remarquable travail effectué avec Ekano », remercie Dejan Krunic. « Ils ont tout mis en œuvre pour le soigner et nous le retrouvons tel que nous l’aimons, brillant, avec sa remarquable attitude. Il semble toujours heureux de concourir et je ne peux m’empêcher de rajouter qu’il est beau à tomber ! C’est pour nous une grande fierté de voir un de nos produits performer dans une des structures d’élevage françaises les plus reconnues », conclut l’élevage DKS, dont les principaux espoirs résident désormais en l’étalon de cinq ans Belgrade DKS (Darco, Bwp x Montender, KWPN x Concorde, KWPN), acquis récemment par Gregory Wathelet. 

Quels objectifs figurent désormais sur les tablettes du gris ? « Nous redécouvrons Ekano, il saute de manière peut-être plus harmonieuse que par le passé, sans marge excessive, en dégageant le dos. Nous souhaitons vraiment repasser les paliers tranquillement. Nous tenons compte du fait qu’il a deux ans de retard en reprenant là où il était rendu pour lui laisser le temps de bien reprendre confiance et nous veillons aussi bien sûr à la qualité des terrains », analyse Richard Levallois avec prudence. « C’est lui qui va nous dicter l’évolution », complète Jean-Marc Le Guennec, pour qui l’étalon gris est désormais le cheval de tête. Richard abonde : « le seul objectif est donc de faire retrouver à Ekano 100% de son physique et, dans le même temps, lui faire oublier dans sa tête les mauvais mois passés ». Et l’homme de cheval de conclure : « si seulement il avait pu parler… ». Qu’il se console, au haras de Semilly, Ekano est bien écouté.

Photo : Ekano DKS, ici sous la selle de Jean-Marc Le Guennec. Crédit : Jean-Louis Perrier.