Maubeuge ou ces CSI qui tentent de faire de la résistance
En 2024, l’équipe du CSI de Maubeuge a décidé de jeter l’éponge pour l’organisation de sa compétition annuelle. Contraintes budgétaires, logistiques, concurrence accrue au calendrier… Valère Cogniot nous explique les difficultés auxquelles se heurtent les organisateurs qui ne disposent pas de pôle de compétition. Et qui se font de plus en plus rares en France…
Au coeur de la ville et des remparts Vauban, le CSI3* de Maubeuge, chaque année, rassemble des milliers d’habitants et se veut avant tout être une fête populaire, un concours comme on en voit de moins en moins, ne disposant pas d’infrastructures équestres pérennes. Chaque année, il y a donc tout à aménager, la piste, les barrières, mettre en place les boxes démontables, faire appel à plusieurs sociétés de gardiennage, louer et monter les tentes du restaurants et du bar, et tout le mobilier qui va avec… “En termes de logistique, c’est vrai que c’est très lourd“, indique Valère Cogniot, qui accompagne Philippe Lorban dans l’organisation de cet événement depuis dix ans.
“Il faut se dire qu’avant chaque édition, nous avons les forces de l’ordre et les sapeurs-pompiers qui viennent en copieuse délégation faire le tour complet du site. Des arrêtés sont pris, la circulation dans la ville est modifiée… En France, je ne crois pas qu’il y ait encore beaucoup de concours qui fonctionnent sur ce modèle, en plein centre ville. Et c’est vrai que l’organisation de ce type d’événement devient de plus en plus difficile à gérer.“
Des prix de location de matériel qui grimpent
En 2023, pour ne pas se dérouler juste après le Printemps des Sports équestres, l’organisation du concours a décidé de revoir sa date, et de déplacer son événement de fin avril à juin. “Cela a entrainé certaines conséquences : le coût de la location des tentes, par exemple, a augmenté de 10%, car ce type de matériel est davantage demandé en juin“, indique Valère Cogniot.
“On s’est donc retrouvés, déjà en 2023, avec des charges plus lourdes. Et, pour 2024, notre prestataire nous a indiqué que le prix allait sans doute encore augmenter au vu de la demande. A Maubeuge, sur quatre jours, nous servons 1600 repas sur des tables qui, a contrario de ce qui se fait beaucoup sur les concours, restent très accessibles. Les gens aiment y déjeuner ou dîner, notre restaurant est rempli tous les jours, et toute la partie location de matériel est une part importante de notre budget pour assurer ce service. Le bar et le restaurant de Maubeuge, sur quatre journées, ne désemplissent pas. Cela fait partie intégrante de l’événement. On ne peut pas se passer du matériel qui sert à construire chaque année ces aménagements, dont on ne veut pas se passer…”
Crainte calendaire
Les appréhensions de l’équipe organisatrice portent sur l’équilibre du budget. Ainsi, avec des prix de location de matériel plus importants, il faut avoir l’assurance de faire carton plein en termes de fréquentation. Mais, là encore, Valère Cogniot n’était pas serein. “L’année dernière, nous avions échappé à la concurrence de Knokke, en Belgique, car le site était en travaux. Mais, cette année, Knokke, qui ne se situe pas loin de chez nous, propose trois week-ends de concours d’affilée… On sait bien que les cavaliers et les propriétaires aiment ce système d’enchainement de compétitions : cela permet de limiter les déplacements et les frais.”
Outre Knokke, le CSI de Roeser, au Luxembourg, est venu se positionner à la même date que le CSI des Hauts-de-France. “Et puis, bien évidemment, on a toujours face à nous, régulièrement, les concours de Lier et Opglabbeek en Belgique, qui connaissent toujours beaucoup de succès.” Aujourd’hui, comment un concours annuel, sur herbe, peut-il perdurer au milieu de ces poids lourds du concours hippique, qui disposent de tout le confort nécessaire pour convaincre les sportifs de fréquenter assidûment leur site ? Alors, en 2024, Maubeuge a décidé de jeter l’éponge. Il bénéficie pourtant du solide soutien de l’entreprise de travaux publics Lorban, qui met son savoir-faire au service du concours, ainsi qu’un important investissement financier. La mairie soutient également l’événement.
Irrémédiables pôles de compétition ?
Mais cela est-il suffisant dans le contexte actuel ? “On souhaite revenir en 2025“, indique Valère Cogniot. “Mais je pense que l’organisation d’un tel événement, avec les contraintes qui sont les nôtres, sera de plus en plus difficile à assurer. Si nous étions en possession d’infrastructures, la donne ne serait bien évidemment pas la même, d’autant que la demande des cavaliers, y compris pour des concours nationaux, est forte. Notre zone de chalandise, si on peut le dire ainsi, est large : l’Aisne, les Ardennes et la Wallonie. On manque de ce type d’infrastructure dans le nord de la France si on veut organiser du beau concours. Et, honnêtement, dans le Nord, il n’y a rien. La région de Lille ne dispose pas d’aménagement de la sorte, ni celle de Valenciennes. Il faut quasiment remonter jusqu’au Touquet pour trouver un site d’envergure… ” Entre compétitions annuelles sur des sites éphémères, de plus en plus rares, et pôles équestres à plusieurs dizaines de journées de concours par an, l’évolution des sports équestres semblent pencher pour la deuxième solution… au regret de beaucoup, évidemment, mais qui comprennent sans aucun doute les lourdes contraintes de ces organisateurs, souvent bénévoles.